BADALING LING

Ils mourront parce qu’ils ne me verront pas. Dans l’air, il y a toujours la même odeur. Ça gratte la gorge quand ça pénètre par les narines. On brûle les fientes de loups pour dire qu’ils arrivent. La fumée noire des fientes de loups se voit de loin. Rien à voir avec celles des poulets.

Je compte dans ma tête : Yi… Er… San… Trois coups de canon pour mille ennemis qui viennent. Mille soldats qui mourront de ne pas m’avoir vu. Je vise toujours la tête. « Ling » la corde de l’arc résonne. « Ling » la flèche file vers son but. « Ling » elle transperce la chair. Souvent la flèche pénètre dans l’orbite. J’imagine le bruit de l’oeil quand il éclate. « Ling » aussi.

J’en touche un, les autres me cherchent. Je vois leurs yeux qui parcourent la muraille, cherchant la faille, la fente, le trou où je me terre. Je vois leurs yeux. « Ling » je ne les vois plus.

C’est toujours la même chose. L’odeur des fientes de loups, les coups de canon et les yeux qui éclatent. « Ling », « Ling », « Ling », « Ling », « Ling »…

Ils reviennent toujours. Peut-être que ce ne sont pas les mêmes mais ils ont tous les mêmes yeux pour moi. Des yeux qui ne me voient jamais. « Ling »

Bian n’est pas d’accord. Pour lui, l’oeil qui éclate ne peut pas faire « Ling ». L’oeil qui éclate fait « Pong ». Bian vise toujours les coudes. Qu’est-ce qu’il y connaît aux yeux ?

Ils meurent parce qu’ils ne me voient pas. Ils meurent par là. Par l’oeil qui aurait dû me voir. S’ils ne l’utilisent pas, c’est qu’ils n’en ont pas besoin. « Ling », « Ling », « Ling », « Ling »…

Un oeil qui éclate, ça ne fait sûrement pas « Pong ».

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